Mémoire du Conseil des Églises pour la justice et la criminologie

Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie (CEJC) désire appuyer les recommandations formulées récemment par  l’Association canadienne des sociétés Elizabeth Fry (ACSEF) au Comité permanent des finances de la Chambre des communes dans le cadre des consultations préalables au budget de 2012 du gouvernement du Canada.

Des études antérieures et une foule d’éléments de preuve indiquent que le projet de loi omnibus du gouvernement sur la criminalité ne rendra pas nos concitoyens plus sûrs, mais aura plutôt comme conséquence de délester le gouvernement d’importants problèmes sociaux et de les imposer au système carcéral, tout en renforçant les comportements criminels en raison de la nature de l’incarcération elle-même.

Nous encourageons le ministre Toews à tenir compte de l’humanité spirituelle des victimes, de la société et des contrevenants dans la conception d’un nouveau système de justice, un système qui se préoccupe de la pauvreté et de la violence sexuelle et familiale en tant que facteurs déterminants du comportement criminel des détenus, tant des hommes que des femmes.

Une étude récente menée par le département d’économie de l’Université de Western Ontario portait sur les coûts de la violence faite aux enfants sous toutes ses formes. Chaque année, au Canada, la violence envers les enfants entraîne des coûts de près de 16 milliards de dollars. Ce chiffre comprend les frais juridiques, qui s’élèvent à 616 685 247 $ (frais liés aux services de police, aux procès, à l’aide juridique, à la Commission d’indemnisation des victimes d’actes criminels de même qu’au système de justice pénale en ce qui a trait à l’incarcération, aux libérations conditionnelles et aux libérations d’office). Comme le soulignent les auteurs de l’étude, « les coûts pour la société en général sont très élevés ».

La CECJ croit que cet énoncé fait écho à une conviction des défenseurs du principe de justice réparatrice, soit que les coûts pour la communauté — le troisième partenaire, souvent silencieux, dans le processus de réparation — ne sont pas pris en compte lorsque les comportements violents des adultes découlant de violence physique et sexuelle subie pendant l’enfance sont présentés comme se produisant en vase clos. En réalité, les dommages causés par les mauvais traitements subis pendant l’enfance affectent profondément la vie de la majorité des détenus.

Audra Bowlus, coauteure du rapport et professeure au département d’économie de l’Université de Western Ontario affirme que « l’investissement bien planifié de sommes publiques importantes dans la détection, la prévention et le traitement rapides de la violence à l’endroit des enfants pourrait être très bénéfique aux victimes ». Tanis Day, consultante indépendante et coauteure du rapport, soutient que « l’établissement des coûts économiques est intéressant en ce qu’il constitue souvent le terrain d’entente qui permet le rapprochement entre les conservateurs fiscaux et les activistes de la lutte contre la violence ».

Le ministre peut consulter le rapport à l’adresse suivante :

http://www.lcc.gc.ca/en/themes/mr/ica/mckenna/mckenna_toc.asp

Nous appuyons en principe les recommandations de l’ACSEF en ce qui concerne la responsabilité sociale et l’établissement d’un organe de surveillance, comme un comité national de gouvernance des femmes, doté de la capacité d’inspecter et de surveiller les prisons pour femmes et de produire des rapports sur leur respect des obligations du Canada au titre de la Charte canadienne des droits et libertés et de ses ententes internationales.

Nous appuyons aussi l’ACSEF lorsqu’elle exhorte les parlementaires « à faire en sorte que le projet de loi omnibus sur la criminalité ne soit pas déposé ou adopté dans sa forme actuelle, mais que l’argent des contribuables soit plutôt affecté aux logements sociaux, aux services de garde des enfants, aux pensions, aux soins de santé (y compris de santé mentale), au système public d’éducation, aux services aux victimes et aux autres services sociaux ». Investir des deniers publics dans ces domaines contribue directement à la santé et au bien-être de ceux qui, autrement, pourraient sombrer dans la criminalité pour subvenir à leurs besoins.

Respectueusement soumis,

Janet Handy

Directrice administrative

Conseil des Églises pour la justice et la criminologie